Say someting, I'm giving up on you | Erna #1

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Say something, I'm giving up on you

And I am feeling so small, It was over my head... I know nothing at all ✧

Un bras le long du sol, la soie caresse sa silhouette.
Quand la belle sort, la maîtresse s'apprête.
Joanna avait autrefois des rêves.
Aujourd'hui, elle en crève.

Couchée dans un lit étranger, Joanna regarde le mur sur le côté. L'odeur de cet appartement est dérangeante. Cette odeur de peinture humide qui lui rappelle ses ébats putrides. Pourquoi donc s'est-elle offerte à cet homme? Les événements de la nuit passée lui reviennent en tête. Le sourire du barman quand elle a commandé un verre de vin rouge. C'était comme s'il lui disait d'un simple regard qu'elle n'était pas au bon endroit pour consommer du pinot noir. Mais Joanna se fichait des apparences, se fichait des convenances.

Le verre en main, ses ongles caressaient le bord, effaçant le rouge à lèvre qu'elle venait d'y déposer. Insistant, un visage l'oppressait. Inconnu au bataillon, le brun avait les cheveux en bataille. Pour peu, elle savait qu'elle finirait au lit avec lui. Ils n'avaient pas encore échangé un seul mot. Mais un simple coup d'oeil vers son téléphone, vers le vide qui s'y était installé... suffisait à confirmer son pressentiment. Il n'avait pas appelé.

Il.

Lui.

Ernest.

Son époux.

Un sourire la transcende. Ce n'est pas la séduction qui l'anime, c'est la souffrance. Elle sait vers quoi elle va, elle sait les regrets qu'elle éprouvera. Mais Joanna est Joanna. D'un sourire trop beau pour être vrai, elle invite l'étranger à la courtiser. D'un regard sans pitié, elle sait que cette nuit, elle va l'écraser. D'une passion étouffante, d'ébats distants, d'une manière ou d'une autre, elle imposer sa suprématie sur cet homme qui ne sait pas à quoi il s'attaque.

Trois heures plus tard, la voilà à regarder le mur dans le noir. Prête à partir sans un mot, elle s'obstine à analyser les petits chiffres sur le réveil de cet artiste. Il est trop tôt pour rentrer. Trop tôt pour venir faire face à Ernest. Et pourtant, elle ressent l'envie de partir en courant, là maintenant. Quand l'inconnu dont elle n'a pas pris la peine de retenir le prénom tente de l'enrouler dans ses bras, Joanna se raidit et froidement lui dit "No." C'est sans appel. Elle se redresse, sans jeter un regard vers celui qui la pénétrait encore il y a quelques minutes à peine.

La nuit n'est pas avancée. Il est à peine minuit trente quand Joanna parque sa voiture devant la maison des Farewell. Elle sourit en imaginant sa mère prononcer ces mots "La maison des Farewell." Elle visualise sans difficulté l'air pincé et dédaigneux qu'elle aurait. Cela lui écorcherait la langue de parler ainsi du domicile de sa fille.

La porte se referme doucement derrière elle et Joanna n'a pas besoin de le voir pour savoir qu'il est là. Probablement assis dans son canapé, à la faible lueur de la lampe de salon démodée qu'elle a dénichée dans un marché aux puces. Elle traverse le corridor calmement, comme elle sait le faire. Comme l'infidèle qui a appris à cacher ses méfaits. Maîtresse d'elle-même, elle s'arrête devant le salon, jetant un regard sur Ernest qui est bel et bien là où elle l'avait prédit.

- Bonsoir.

Bonsoir clame la veuve noire
Bonsoir, dis adieu à l'espoir.
Bonsoir, et d'un seul regard
Elle revient dans ton manoir.

Joanna se déchausse nonchalamment, se souciant peu de porter sur elle l'odeur de son amant. Elle revient du théâtre, elle ne sent jamais bon. Mais de toute façon, Ernest ne lui demande jamais rien. Joanna devrait aller se laver, mais elle s'assied dans le salon, dans un canapé face à lui, de l'autre côté de la table basse. Elle le nargue avec sa froideur désintéressée, comme si de rien n'était.

- Tu as passé une bonne journée?

La démone joue avec les sentiments. Avec les siens mais aussi avec ceux d'Ernie. Elle sait qu'elle leur fait du mal mais il ne comprend pas à quel point elle est torturée. Et quand bien même, elle serait plus en sécurité dans leur chambre, cachée sous les draps... Joanna veut profiter de ce retour à la maison plus tôt pour le regarder. Ernest lui manque.

️ nightgaunt

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and if we share in this sadness,
then where have you been?
-

le vide est chagrin.
le silence est taquin.

le mutisme fait des dégâts
tandis que les mots font débat
pour savoir qui, ou quoi,
aura le courage de souffler dans l'immédiat,
la tristesse que ernest boit.

et son coeur se broie,
dans le noir intense de cette plaie béante. un rouge carmin qu’il ne peut que sentir, aveugle dû à la noirceur d’une nuit. dans le ciel s’accoutument quelques étoiles, mais elles sont faibles. elles ressentent la tristesse qui tiraille les entrailles les plus profonds. la lune est peureuse, ne laissant briller qu’un maigre filet. elle se laisse mourir pour laisser à ernest le plaisir de se morfondre dans un noir parfait.

mélancolie aggravée,
d’être rentré pour ne voir personne.
un éclat terrible au creux de sa poitrine dépravée,
il a sentit son coeur frissonner.

c'est dans le salon triste et sans envergure, que l'homme s'y est niché.
c'est dans des verres à moitié vide, à moitié plein, que l'homme en a versé.
des larmes, des larmes et des larmes. certaines se faisaient ravaler, d'autres gisaient sur la table, les plus chanceuses s'accrochaient comme elles pouvaient à sa joue.

le trou béant qu'il traînait dans ses valises depuis bien longtemps, se déchaînait à l'idée de goûter au soleil bleu. c'est dans des verres d'alcool à la glace fondue, qu'il accepta de montrer le peu de vide, à ce cœur foutu. ça n'allait pas pour autant. ernest retenait ses cris de désespoir et ses signaux d'alertes battaient contre ses tempes jusqu'à l'explosion. ses mots, si jolis, si doux, si agréables à entendre, quémandaient la sortie.

la fatigue se nichait dans cette tristesse soudaine.
la fatigue d’une journée éprouvante,
d’un boulot étouffant.

tristesse causée par ses maux,
son mal,
elle.

à cette femme qui détruit les plus petites parcelles de son coeur. avec nonchalance. avec quiétude. dans une simplicité déconcertante. elle s’enroule autour de sa vie, de sa peau pour partir et le saigner jusqu’à la chair. (il devrait les écouter. eux. les gens. le monde. le monde qui s’insurge à voir l’âme d’ernest se torturer pour un mal qu’il pourrait effacer. quitter d’une colère gênante. il est dans son droit. mais- mais, ce grand mais. ce mot qui s’acharne sur ses lèvres. mais-)

s’en vouloir de pleurer pour un être cher,
il sécha ses larmes enfantines.
il s’assit dans ce canapé horrible, en main le dernier verre.
le sommeil engloba sa bouche mutine.

il ne sait pas si le bruit du levier faisant des siennes ou le plafond qui s'effrite un peu plus chaque jour le réveilla en premier. avec une nonchalance qu’il ne se connaissait pas, il se débarrassa de ses bouteilles vides et nettoya ses verres. ernest hésita un instant. devrait-il aller se coucher?

pour sentir une nouvelle fois cette solitude,
accroché à des draps nus
le coeur pendant presque mort?

assis sur le canapé, il compta les secondes et les minutes. les heures et le temps. les étoiles et la lune. ce soir, sa femme aimante fera-t-elle l’honneur de se montrer parmi les ombres? ou se défilera-t-elle dans la rue jusqu’au lever du jour? un mouvement sur sa droite, et quelle surprise. cette femme qu’il aime tant (toujours autant?) est là. devant lui. une hallucination? non. le timbre de sa voix résonne contre son âme et soudainement, la solitude s’échappe comme une brise d’été. bonsoir. une politesse qui fâche et monte une structure de glace entre les deux êtres. elle est froide, si froide qu’il est sur et certain que la température a baissé de quelques degrés. oui. mensonge. des mensonges dont ils connaissent par cœur la mélodie devenue enchanteresse. un drap qu’ils tricotent jusqu’à ce que la laine vertueuse manque ou, qu’un des deux ne se présente pas le lendemain. et toi? tu travailles de plus en plus tard.

car elle n’est pas rentrée hier.
qu’elle ne rentrera pas demain.
et encore demain.
qu’ils ne se croiseront que brièvement
un matin hasard.
qu’ils s’éviteront fièrement
pour une vie choisie.

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Fades, moribonds, s'envolent les sourires
La dame n'a plus que quelques souvenirs
Ceux des matins d'un autre avenir
Ceux qu'elle n'a pas vu venir...

Et tandis qu'elle foule le sol...
D'une maison qui empêche l'envol
De la colombe, de l'aigle et du rossignol
Joanna devine de la clé de l'amour, les bémols.

Il l'attendait. Pouvait-elle douter un seul instant que cet homme charmant, charismatique et fort d'une âme bien trop noble, était là à l'attendre. Ernest, s'endormir dans le salon? Ce n'était pas ainsi qu'elle le connaissait. Du moins, pas quand elle n'était pas là.

Aux premiers instants de leur amour, Joanna revenait de ses pièces de théâtre avec des étoiles dans les yeux. La diva avait foulé les planches, avait abasourdi l'audience et rentrait sans prendre gare, montant les escaliers de leur ancienne demeure pour aller se jeter sur le lit où dormait son seigneur. La jeune Joanna riait aux éclats devant le visage bouffi d'un Ernest qui ne comprenait pas quelle tornade venait de le heurter. Et elle se couchait sur lui, embrassant son cou, lui criant qu'elle avait rayonné, fière de ses exploits.

Aujourd'hui... la beauté demeurait, le talent progressait mais la joie avait délaissé le geai. Aujourd'hui, elle foulait le sol de l'entrée comme s'il s'agissait d'un manoir du 17e siècle. Joanna dominait l'endroit. Elle était chez elle. Et pourtant...

Ton coeur ne chante plus comme avant
Ton âme se demande où est passée l'enfant
Qui croyait à l'amour éternel des malicieux amants
Qui aurait tout vendu pour un regard de son prince charmant.

Le salut qu'ils échangent est froid. Euphémisme. La glace semble s'être installée dans le pôle Farewell. Les époux se regardent sans se voir. Assise dans le canapé, elle l'écoute baratiner d'un "oui" auquel elle ne croit pas. Joanna le défie en retour lorsqu'il s'aventure à l'interroger. Prête à lui demander s'il lui ose lui imposer de justifier son retour tardif, elle se tait. Car ce n'est que dans sa tête qu'Ernest cherche des réponses. Ce n'est que dans sa tête que l'homme cherche à la ramener vers lui. Dans les faits, Ernest est silencieux. Il la perd un peu plus à chaque jour qui passe. Et il ne dit rien, il ne fait rien.

Tu me laisses partir sans rien dire
Tu me laisses partir dans un soupir
Peut-être étais-tu déjà loin derrière
Quand on a commencé à manquer d'air.

- Correcte.

Désabusée, elle répond dans un haussement d'épaules. Il est loin le temps des discussions jusqu'aux aurores. Loin le temps où elle allait se blottir dans ses bras et l'embrasser pour le faire taire. Le rire d'Ernest lui manque. Soudain, cette image de son sourire sincère et de la tonalité de ses rires la frappe. Elle n'y a plus eu droit depuis... elle ne saurait même pas le dire.

- Il est tard.

Le silence ne la gêne pas. Elle ne cherche pas à meubler. La reine de la nuit fait tout autre chose. Elle provoque son ennemi, son mari. Que fait-il encore debout à cette heure-ci? Mais elle ne posera pas la question. Joanna ne s'abaisse pas à faire des enquêtes et à porter des soupçons. Tout comme Ernest se tait sur les doutes qui planent sur la fidélité de sa femme. Elle sort une cigarette de son sac et l'allume sans se soucier de l'hygiène de la pièce qu'elle va embuer de son tabac. Peut-être que dans le nuage de fumée, ils seront plus à l'aise l'un et l'autre. Sans mot dire, elle soulève le paquet de cigarettes et incline la tête silencieusement, laissant la question aller à lui dans le silence. Autrefois, ils parlaient sans dire mot et c'était de la complicité. Aujourd'hui... ce silence ne représente rien d'autre que l'absence de dialogue, leurs faiblesses, leurs incapacités.

️ nightgaunt

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il fait froid
car un frisson parcourt son dos
se bloque contre un cou roi
de désirs radicaux.

peut-être que ce soir,
ce sera la fin.
peut-être que ce soir,
il prendra un plaisir malsain
à lui dire quelques mots malins.
comme :: j’arrête. j’arrête tout.

mais la parade
n’arrive à quitter sa peau maussade.
tremblez, sentiments malades
pour un amour vague.

- I couldn’t sleep.

un mensonge contre un mensonge
ridicule tournoi de cirque
qu’ils alignent et allongent.

alors ernest se lève,
le regard qui se fait soudainement sombre
lèvres fiévreuses et brèves
il est au bord de l’hécatombe.

quand elle lui tend cette cigarette
un de ses sourcils s’offusquent.

- I’ve quit. it’s been three weeks now.

mais elle ne sait pas. car elle ne sait jamais. car ses yeux s’ouvrent et se ferment sans jamais regarder. elle est là sans jamais être là. elle s’en va sans jamais partir. car elle revient. toujours. sous ce toit en ruine, mais pourquoi? il aimerait qu’elle fasse le sale boulot. ne pouvait-elle pas partir quand elle en avait encore le temps? ne peut-elle pas faire comme si le monde ne tournait qu’autour d’elle? il lui reproche ce manque d’égoïsme, quand lui fait preuve de rien.

un vide pour réponse,
un silence pour compagnie,
une ombre pour époux,
un rien pour ernest.

il lui reproche de ne rien faire,
quand lui a le pouvoir d’achever cette relation
aide de l’épée de damoclès.

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Pourquoi rentres-tu quand tu sais
Que ne t'attendent que les regrets
Qu'il te voit comme un songe mauvais
Qu'il n'attend plus jamais...

Pourquoi s'obstiner à le regarder?
Pourquoi son attention quémander?
Ne sens-tu pas ce ton, ce glas?
Ne vois-tu pas qu'il n'est plus là?

Il ne pouvait pas dormir. Ironie du sort, Joanna ne pouvait dormir quand il était dans son lit. Pas parce qu'il la répugnait. Mais parce qu'elle se dégoûtait, elle. Alors, pour éviter de sombrer dans la folie, elle se tournait sur le côté et dévisageait son mari endormi. Car il l'était toujours, n'est-ce pas? Son mari. Son. Hers. Le souvenir lointain d'une Joanna Wagner caressait ce constat, cette envie de possession. Autrefois, Joanna virevoltait auprès de son fiancé, riait aux éclats quand le ruban de ses cheveux s'en allait dans le vent et lui chantait d'arrêter de courir pour le rattraper. "Stop it Ernie. I don't care. It's not mine. Those things are just... things. They don't belong to me." puis de le regarder avec un petit air sournois, d'accrocher son col pour le rapprocher d'elle et de murmurer "Not like you. You, you're mine." C'était doux, c'était une promesse faite au vent, faite à la terre, faite à eux. Les yeux de Joanna brillaient d'un éclat envoûtant. Cet éclat était mort aujourd'hui.

- I see.

Ce n'était pas réellement un dialogue. Derrière cette discussion, les époux jetaient des pierres, frappaient des coups. Cette phrase sur le sommeil disparu, c'était un reproche qu'Ernest lui faisait. Cette réponse que Joanna formulait, c'était son indifférence aux maux énoncés. C'était une guerre, une guerre froide.

La cigarette au bout des doigts, tu t'enfumes
Et tes pensées s'écrasent sur le bitume
Il refuse la main subtile que tu lui tends
Car de toi, il ne veut plus rien maintenant.

Trois semaines qu'il avait arrêté de fumer. Joanna ne s'inquiétait même pas de ne pas avoir remarqué. Dans son esprit, une seule idée courait. Il ne tiendrait pas.

- What a weird thing to do.

Pourquoi arrêter la nicotine quand elle était leur seul réconfort? Du moins pour Ernest. Car il ne la trompait pas, lui. La pensée de cet arrêt pour une autre, de cet effort fait pour plaire à une maîtresse la traversa. Violente, impertinente, cette idée la frappa sans prévenir. Maîtrisant ses émotions, Joanna n'en était pas moins dévastée par cette possibilité.

- Is there a reason behind this decision?

Faible Joanna. Elle se détestait. Lui avait-il jamais demandé pourquoi elle se maquillait différemment, pourquoi elle sentait l'alcool en rentrant, pourquoi ses répétitions étaient devenues nocturnes? S'était-il jamais posé la question du fait qu'elle le remplaçait avec un autre? Cela le gênait-il?

Non.

Mais elle venait de faire une erreur, elle venait de montrer une faille. Seulement, la reine des planches se fustigeait pour rien car en vérité, Ernest ne saisirait probablement pas que cette question était une faille dans son armure. Le ton qu'elle avait employé ne laissait rien paraître. Seule la question était traître. Depuis quand se souciait-elle de ce genre de choses?

️ nightgaunt