Scam me if you can - Simon & Thea

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— Nausée. Lassitude. Blanc. Ses pensées voguant dans un environnement embrumé, plus proche d’un brouillard hivernal qu’une brume matinale la jeune femme savait que quelque chose clochait. Ses souvenirs lui échappaient peu à peu, insaisissables sous ses doigts, jouant avec le feu pour mieux la meurtrir. Punition du verre de trop qui lui semblait si goûtu la veille mais qui lui a laissé un goût acide dans la bouche au réveil. Elle se sent fiévreuse. Sacrée gueule de bois. Cherchait-elle à ce point à se punir ? A se détruire à petit feu. Verre après verre. Comme s’ils lui permettraient d’échapper à ses propres démons. Elle avait trouvé un lieu où se réfugier. Un endroit qui résonnait de vie, de corps d’inconnus. Loin de ces ruelles crades qu’elle sillonnait habituellement pour assouvir ce qu’elle pensait être ses bonnes actions. Loin de lui. Elle n’y avait croisé que des regards d’étrangers. Personne ne la jugeait dans un tel endroit. L’alcool glissait dans ses veines à une vitesse qui la prenait toujours par surprise, la rendant très rapidement exaltée et inspirée. Pourtant les lendemains restaient durs, la ramenant brutalement dans sa réalité. Elle y laissait à chaque fois quelques plumes. C’était sa punition, sa pénitence. La grande et fière Theodora réduite à n’être plus que l’ombre d’elle-même, tel un déchet qu’elle laissait dans un coin. La bouche pâteuse, la jeune femme s’était allumée sa propre cigarette de la journée, priant pour que cette sensation olfactive lui ramène quelques bribes de ses souvenirs perdus. Même son propre cerveau lui faisait défaut. C’est en fouillant dans les affaires qu’elle avait laissé choir au milieu de son appartement qu’elle comprit que quelque chose lui échappait ou plutôt lui manquait. Contre toute attente ce ne fut pas le fait que ses affaires soient éparpillées sur son tapis qui la frappa le plus, mais justement qu’elle ne mette pas spontanément la main sur son badge de la clinique. Véritable sésame à la clinique elle ne pouvait circuler sans. Pestant contre elle-même elle se promit intérieurement de réduire sa consommation d’alcool la prochaine fois. Promesse insensée et qui sonnait creux au regard de la situation.

Après près d’une heure de recherche peu fructueuse, la jeune femme capitula. Elle se sentait stupide et désarmée. Pestant contre elle-même elle finit par se résoudre à revenir sur ses pas. Elle n’avait aucun souvenir de ses dernières heures avant d’avoir sombré dans une léthargie alcoolisée et tentait de s’expliquer comment elle avait pu rentrer jusqu’à chez elle. Seule. Elle n’avait découvert le corps d’aucun inconnu ce qui lui avait procuré un sentiment d’allégresse passager. Son application Uber ne faisait cas d’aucun trajet dans la nuit ce qui ne l’aidait pas dans la reconstitution du puzzle de sa soirée.  Penaude, la jeune femme finit par capituler et se résolut à tenter le dernier bar dans lequel ses yeux lui semblaient encore ouverts. Ses chances étaient maigres mais une main innocente aurait pu tomber dessus. L’après-midi était déjà bien entamé quand Theodora débarqua sur les lieux du crime. Elle détestait revenir sur des lieux qu’elle ne connaissait qu’enivrée. Avait-elle honte ? D’elle-même oui. Elle voyait avec des yeux neufs la vie misérable dans laquelle elle se traînait la nuit. Exit les artifices de la nuit, les néons qui attiraient l’œil, l’endroit restait un bar sordide. Soupirant de sa propre stupidité la jeune femme finit par pousser la porte du bar. Laissant son œil s’habituer à la pénombre elle jette un regard alentour. Oui c’est bien le dernier endroit que son cerveau a pu mémoriser de sa soirée. Mais ce dernier est bien têtu et ne lui laisse aucun répit, refusant de délivrer quoi que ce soit, gardant secrètement tout indice qui pourrait l’aider. Avisant quelqu’un derrière le bar, Theodora s’y dirigea, cherchant le peu de prestance qui lui restait dans un tel endroit. Au pire qu’avait-elle à perdre ? Ce type devait en voir des centaines comme elle chaque jour. Blasés de leur vie, les gens avaient vite tendance à se réfugier dans l’alcool. Doux poison qu’était l’alcool. Lui n’était que le bras qui servait les verres et qui encaissait l’argent à la fin.  

Excusez-moi. Ma requête peut vous sembler quelque peu incongrue et je suis certaine que beaucoup de gens vous font le coup et que vous devez être fatigués d’entendre cette même rengaine, mais je pense être venue ici hier soir. J’ai peut-être même fait la fermeture. Bref, je suis convaincue d’être venue ici et je ne sais pas comment je suis repartie. Quand bien même, j’ai perdu un badge. C’est un badge sécurisé et ce serait vraiment formidable…genre vraiment super…si vous l’aviez récupéré. Ça me sauverait.

Mais pourquoi est-ce qu’elle se sentait obligée de parler autant ? Au secours. La gêne de sa propre situation la submergeait complètement. Se ressaisir. Inspirer. Expirer. Et au pire elle devrait faire son mea culpa auprès de sa direction.