Forbidden - Dante & Thea

Posé sur un banc, les yeux rivés sur les nuages blancs, Dante essayait de respirer. Il avait passé une mauvaise nuit. Les démons s'en prenaient à lui dernièrement. Et pour cause, on venait de dépasser la date anniversaire de sa mise au trou. Il pensait à la prison pour ne pas penser au corps sans vie de l'homme qu'il avait tué. Dante riait autrefois. Il riait autrefois de ces gens qui prétendaient qu'ils ne pourraient pas ôter une vie si c'était nécessaire. Et lui, il avait dit vrai: il en était capable. Le souffle avait quitté les poumons de celui qui s'appelait Matthew. Ce prénom était bien ancré dans son esprit. Parfois la nuit, alors qu'il dormait, il entendait une voix féminine crier ce nom. Pourtant, celle qui était venue voir le cadavre n'avait pas prononcé un mot.

Théodora Hamilton. Un fantôme qui le hantait bien plus que celui du défunt. Ce regard froid qu'elle avait posé sur lui, cette expression de vide qui l'avait glacé. Dante est ce genre d'homme que rien n'ébranle. Vous pourriez même lui arracher un ongle, il resterait stoïque. Et il sait de quoi il parle car la vie en prison n'est pas des plus douces. Des tortures, il en avait vécu quelques unes. Quand Jax avait quitté l'enceinte des lieux, Dante était devenu une proie parfaite pour les gros bras. Mais ce n'était pas une mauvaise chose. Car vivre dans la peur de ces hommes était une façon presque saine de ne plus penser aux fantômes qui lui rendaient visite quasiment chaque nuit.

Seulement Dante n'était plus en prison. Et cette nuit, la voix imaginaire de Théodora était venue de le secouer. Les femmes s'offusquaient que Dante ne partage jamais leur couche une fois les ébats terminés. Mais l'homme avait ses raisons. Au-delà du mépris qu'il leur portait, il refusait de leur montrer cette faiblesse. Ses cauchemars. Agité ce matin-là, Dante prit la tangente et quitta son appartement. Tout valait mieux que de rester dans cette ambiance morbide qui habitait sa chambre. Il fit un tour, prit de l'air et se risqua même à un café. Son ventre grognait. L'homme n'était pas du genre à se faire à manger et préférait toujours aller dans un bistrot où la serveuse n'avait d'yeux que pour lui. Il n'avait pas (encore) couché avec elle. Il n'aimait pas l'idée qu'elle cracherait dans son plat une fois qu'il l'aurait fait. Et n'ayant pas envie de changer de local pour ses habitudes, il retenait ses ardeurs. Peut-être serait-elle virée bientôt et il pourrait alors aller la culbuter ailleurs. Après avoir mangé, il erra toute la journée. Et le soir, il se rendit à nouveau au bistrot.

Assis, il commanda une bière. Son déjeuner n'avait pas été assez consistant que pour supporter aisément l'alcool. Mais il s'en fichait. Il n'avait pas envie de manger ce soir, juste de boire. Lorsque la serveuse revint, il s'apprêta à lui demander de déguerpir. Mais la femme qui venait de s'asseoir devant lui n'était pas Trish. Le visage de Dante se ferma instinctivement. Ses pupilles dilatées, il attendait que quelque chose de mauvais se passe. Sans même s'en rendre compte, son coeur battait plus vite. Qu'est-ce qu'elle faisait là? Etait-il en train de rêver? La seule manière de le savoir aurait été de faire quelque chose d'insensé. Mais même dans ses rêves, il n'osait la combattre, l'affronter. Dante était tenté de se lever et partir. Mais Trish revint avec sa bière et sourit à Théodora en lui demandant ce qu'elle voulait. Dante grogna "Dégage." à la serveuse, ne laissant pas son invitée surprise commander. Indignée, celle qui flirtait impunément avec lui partit. C'était raté s'il espérait qu'elle ne cracherait pas dans sa prochaine assiette.

Le regard posé dans celui de Theodora, il la sondait. Pendant combien de temps étaient-ils restés ainsi sans rien se dire la dernière fois? La mâchoire serrée, il n'avait pas envie de briser ce silence. Mais ce petit jeu était malsain. Car elle avait du pouvoir sur lui. Elle était bien la seule femme avec cet atout. Et c'était impossible à accepter. Alors, il se décida à rompre le silence. "Si tu espères des excuses, tu peux repartir." Froid. Sa voix était glaciale. Elle ne tremblait pas et pourtant toute son âme tremblait devant cette femme aux allures d'esprit revanchard. Pourtant, elle ne disait rien. Mais cette expression dans son regard.

Qu'est-ce qu'elle faisait là. C'était la question la plus rationnelle qui soit. Et sans même qu'il ne s'en doute, la réponse était tout sauf rationnelle. Quel était ce besoin pour la femme délaissée par son défunt fiancé de venir s'imposer ce supplice? Pourquoi confronter le mal en personne? Et pourquoi était-il si mal à l'aise devant elle? Dante n'aimait pas cette situation. Il l'aimait tellement peu qu'il avait cherché à se débarrasser d'elle en la faisant fuir. Chasser la dame en lui montrant qu'il n'avait pas l'intention de s'excuser. Car il n'en avait pas la moindre intention. Les gens ne l'avaient pas vu ainsi mais Dante ne se sentait pas vraiment coupable. Il avait eu un choix à faire : sa vie ou celle du conducteur derrière. Il pensait que le chauffeur derrière lui était celui qui le poursuivait depuis le départ. Il pleuvait. Dante s'est servi de cela à son avantage.

Le jury avait condamné le dealeur. Vendeur de drogues qui trempait dans une affaire louche dont on ne tenait pas tous les aboutissants, il avait un mort sur les bras. De sa propre confession, il ne connaissait pas le décédé. Cet homme se trouvait au mauvais endroit au mauvais moment. Comment avait-il atterri là? Personne ne le savait. Mais Dante avait le profil du criminel parfait. Le système avait besoin d'un coupable, la société voulait clamer que la justice avait été rendue. Alors Dante avait pris 8 ans. Personne ne s'y était opposé. Même pas lui. Trop fier que pour jouer le jeu que son avocat lui avait appris, il s'était refusé à jouer la comédie ou à prétendre être quelqu'un d'autre.

Theodora souhaitait-elle qu'il joue la comédie pour elle? Devait-il faire semblant d'avoir des regrets pour qu'elle soit apaisée ? Il n'en avait pas envie. Elle hantait ses nuits. Pourquoi aurait-elle le droit à la paix? Une femme. Comme toutes les autres, elle devait être source de décadence.  Elle ne méritait pas sa compassion, elle n'avait le droit à rien de lui.

Theodora lui jeta une phrase détachée. Mais dans ce détachement, Dante percevait une accusation. Sans la dire clairement, il n'y avait aucun doute sur le message donné. Les morts sont morts. Et Matthew était mort à cause de lui. Il aurait pu laisser passer mais elle était venue le chercher, le provoquer avec ce regard persistant et inconfortable, avec ces accusations silencieuses et même... avec ses cris qu'il entendait dans la nuit, dans ses cauchemars les plus profonds.  "Je ne t'ai pas demandé ton avis." Il ne lui avait rien demandé. Assis sur sa chaise, la fixant sans ciller, il avait envie qu'elle parte, que cette discussion cesse. Et en même temps, une part de lui était soulagée de se trouver face à ce fantôme harceleur.  "Pourquoi t'es là alors? " Pourquoi tourner autour du pot. Autant qu'elle lui dise, autant qu'elle délivre ce pour quoi elle était venue.  "Je ne te serai d'aucun réconfort. Je n'ai pas envie de te parler. Je n'ai... " Il s'arrêta un instant, réfléchissant à ce qu'il allait dire. Et un éclair vicieux le traversa. Il tendit sa main vers la sienne, par-dessus la table. Saisissant le bout de ses doigts, il lui dit avec un regard froid  "Tu crois que ça peut t'aider? Que le meurtrier de ton fiancé t'offre une épaule pour pleurer? " C'était méchant et gratuit. Détestable, il la repoussait de toutes ses forces. Alors qu'il prenait un malin plaisir à séduire les femmes dans un premier temps, il ne faisait pas cet effort avec elle. Car Thea le mettait mal à l'aise. Il ne comprenait pas à quoi c'était dû. Mais au contact électrique que ce bref contact créa entre eux, il comprit qu'il y avait quelque chose qui le dépassait. Alors il avait besoin de réponses. Mais il venait de lui demander de fuir. C'était au-delà de tout ce qui était rationnel. Dante aurait voulu se gifler pour ce désir qui le prenait au cou. Pourquoi les choses étaient-elles ainsi? Pourquoi Thea lui faisait-elle cet effet bizarre? Elle avait quelque chose d'étrange et de dangereux. Cela venait de cette obscurité dans ses yeux. Et ses yeux, c'était tout ce qu'il avait connu d'elle jusqu'à présent. Maintenant qu'il connaissait sa voix, qu'il connaissait plus d'elle.. Dante savait qu'elle le hanterait encore plus et de manière plus virulente. Car quoi de plus effrayant que cette réalité? Le fantôme n'est pas fantôme. Il est là et il vient de s'imposer dans la vie de Dante comme un élément auquel il n'échappera pas.

Elle ne comprenait pas elle-même. De ses propres dires, Théodora ne savait pas pourquoi elle était là ni ce qu'elle cherchait. Dante détestait ce genre d'aveu de faiblesse. Si elle venait pour chercher des réponses et qu'elle espérait qu'il allait lui prêter main forte dans le processus, elle se mettait le doit dans l'oeil. Le bon samaritain Dante. Comme disaient les gosses, lol. Il leva les yeux au ciel devant sa réponse bien trop niaise.

Si elle ne savait pas, il avait la solution. Dante la pousserait dans ses retranchements. Il savait très bien comment il pouvait pousser une femme à oublier ses espoirs le concernant. Quels que soient ceux de Théodora, elle serait vite rappelée à l'ordre. Seulement, en punissant celle qui n'avait initialement rien demandé, il provoquait des réactions qu'il n'avait pas anticipées. Cette main sur celle de Théodora créa une sorte de vide temporel, comme s'il s'était enfermé dans un autre espace-temps. Cela ne dura qu'une fraction de seconde. Une fraction de temps perdu, où l'électricité de leurs peaux les choqua l'un comme l'autre. Mais la brune n'avait pas l'intention de le laisser envahir son espace personnel de la sorte. Pas quand Dante se moquait d'elle en la maternant d'une manière grossière.

"Oh, j'ai dépassé les bornes? "

Elle avait la tête enfouie entre ses mains et regardait la table. Elle ne pouvait pas voir son expression de garçon penaud surjouée. Dante était peu fréquentable. C'était comme s'il se nourrissait des peines et des malheurs humains. Personne ne savait qu'il gardait cette carapace afin que personne ne s'imagine qu'il pouvait lui-même avoir des failles. Théodora ne savait pas du tout à qui elle se frottait. Mais puisqu'elle était venue le chercher, Dante ne se priverait pas de lui offrir un show privé.

La belle n'apprécia sans doute pas l'ironie de Dante. Ou alors, peut-être avait-elle été puiser de la force en elle. Cette force, il la connaissait. Il l'avait vue dans son regard le jour de la mort de l'autre gars. C'était drôle comme le décédé était soudain devenu insignifiant entre eux. Théodora parlait et expliquait comme cela l'avait dévastée mais c'était comme si un autre jeu s'était installé entre elle et lui. Il ne s'agissait pas de cet événement tragique. Il y avait une autre énergie qui les emprisonnait ensemble. Dante chassa la pensée de ce courant électrique lors du touché de sa peau. Mais elle parlait vite et cette logorrhée semblait sans fin.

Il ne retint qu'une information qui lui sembla capitale. "Et maintenant il ne reste plus que toi et moi. Et je n’arrive pas à me sortir ta putain de présence de ma tête !" Intrigué, il la regardait qui le dominait de toute sa taille dressée au dessus de lui. Dante la fixait droit dans les yeux sans blêmir. Dans cette rage qui animait ses yeux, il trouva une lueur de beauté. Théodora. Aimée de Dieu. Tout l'inverse de lui. Lui dont le prénom avait été emprunté à un écrivain italien qui s'était amusé à écrire une oeuvre appelée le purgatoire.

"Doucement ma belle."

Etait-ce de la provocation? Oui, très certainement. Il se leva pour se retrouver au même niveau qu'elle. En vérité, il était un peu plus haut qu'elle et maintenant, elle perdait donc son avantage.

Tous deux n'étaient pas destinés à avoir des accointances ensemble. Ils étaient de milieux différents, il pouvait le flairer à son odeur caractéristique des gamines fortunées. Puis la classe de ses vêtements laissait peu de doute à ce sujet. Debout, face à elle, il mesurait les différences qui les séparaient. De l'extérieur, personne ne les aurait vu ensemble. Vêtu de son jean et de sa chemise à carreaux, il était trop bourru pour fréquenter une délicate fleur comme elle. Et pourtant, elle représentait tout ce qu'il aimait : les défis difficiles à relever. Seulement au-delà de l'apparence et de la personnalité de Theodora, il y avait son histoire. Et cette histoire, il la lisait dans son regard agressif.

Dante leva une main vers son visage. Il jouait avec le feu et le savait très bien. Il chassa une mèche rebelle qu'il positionna derrière l'oreille de son interlocutrice. Les yeux fixés dans son regard, il reprit sa main vers lui, ne souhaitant pas prendre le risque d'une morsure.

"Je ne sais pas ce que tu cherches. Tu ne sais pas ce que tu cherches. Et nous voilà ici, avec toi qui n'arrives pas à me sortir de ta tête."

Son ton était plus doux. On aurait dit qu'il essayait de la rassurer, d'être plus gentil pour une fois. Puis il esquissa même un sourire, un sourire qu'il agrémenta d'un "Peut-être que je devrais tuer des mecs plus souvent, on dirait que ça me réussit bien!" Il rit d'un rire jaune. C'était vraiment odieux mais il s'en fichait. Il voulait la pousser à bout car sa confession l'avait troublée. Pourquoi pensait-elle à lui? La hantait-il comme elle le hantait? Pressentant qu'elle allait partir ou peut-être qu'elle allait lui mettre une gifle, il attrapa à nouveau sa main et attira Theodora plus près de lui, trop près... "Je ne sais pas pourquoi tu penses à moi, vraiment je l'ignore. Mais si j'étais toi, je partirais en courant. Rien de bon ne sortira de tout ça, Princesse. " Il appuya sur le dernier mot. Bien qu'il avait fait cette démarche pour appuyer sur le côté loufoque de la situation, pour attirer son attention sur la dangerosité de l'animal, Dante ne pouvait pas ignorer que ce rapprochement entre eux avait accéléré ses pulsations cardiaques. Il espérait qu'elle allait partir dans la seconde car cet échange était trop intense et il savait déjà que Theodora allait le hanter avec un autre style désormais.

La fascination du mal. Voilà un hobby qui n'était pas des plus recommandables. Et pourtant, cela occupait l'esprit du Dante. Cela le préoccupait même. Les êtres humains s'acharnaient à justifier leur action, prétendant qu'elles étaient toujours dans un but noble. Alors, il allait à contre courant, préférant ne pas salir sa réputation de bonnes intentions. Car lorsque l'on fait bien, les gens s'attendent au bien. Il avait entendu cette phrase en zappant à la tv. C'était une série kitch pour des ados en rut, un vampire sans coeur clamait cela avant de fermer son humanité. Et bien que la fiction n'ait été que fiction après tout, Dante s'était retrouvé dans ces mots entendus par hasard.

Aujourd'hui plus que jamais, le mal l'habitait. Car le passé était sorti d'outre-tombe pour venir le torturer. Belle, la veuve portait le deuil avec une attirance excessive. Ce refus de lui, ce dégoût qu'il provoquait en elle, c'était sa came. Theodora sans le savoir, provoquait la bête qui vivait en lui. Parfois endormie, il la laissait se déchaîner à chaque fois qu'une gazelle posait les pattes sur son territoire. Certaines se faisaient déchiqueter gentiment tandis que d'autres n'avaient droit à aucun traitement de faveur.

Dante analysait Theodora comme on analyse son prochain repas. Les dents acérées était recouvertes d'un sourire trop doux que pour être sincère. Venant de lui, seul le mépris pouvait être plausible. Et lorsqu'il rangeait ses phrases misogynes et ses répliques cinglantes, c'était toujours qu'il préparait le pire. Son interlocutrice semblait s'en être rendu compte car au-delà de sa fascination morbide, il sentait sa peur poindre. Cependant, la petite biche brune envoyait des signaux contradictoires. Elle clamait qu'elle voulait qu'on la lâche et pourtant, elle était là, attendant qu'on resserre l'étau autour d'elle. Dante savourait cette victoire totale sur celle qui ne parvenait pas à le haïr entièrement. Mais il savourait surtout sa propre conviction : il finirait par la persuader de le détester. Si elle pensait qu'il l'obsédait pour autre chose que le dégoût, elle se trompait. Dante n'était pas digne d'une obsession saine. Cependant, il se plaisait à l'imaginer couchée sur son lit, fixant le plafond et à penser à lui. Allez savoir pourquoi, il la visualisait sur un lit une personne. Probablement parce qu'il avait ôté la vie à celui qui aurait dû être son partenaire de nuit.

"Personne ne te retient ma belle. "

Sa main était toujours sur elle, l'empêchant de partir sans violence. Elle n'avait qu'à se retirer, et il ne la retiendrait pas. Mais les faits parlaient d'eux-mêmes, elle ne se défaisait pas de son étreinte.

" Mais tu n'as pas envie que je te lâche."

Il parlait avec une assurance déconcertante. Pourquoi était-il si sûr de ce qu'il avançait? Il n'en savait rien. Mais il se sentait connecté à cette âme en peine qui le toisait sans réticence. Theodora cédait du terrain, elle lui donnait raison et Dante souriait à cette capitulation qui ne servait en vérité à rien. Le mal était fait des deux côtés. Tous deux avaient besoin de s'éprouver l'un l'autre. Elle parce qu'elle avait besoin d'apaiser sa peine et lui parce qu'il désirait soumettre celle qu'on ne soumettait pas. On ne soumettait pas la femme à qui on avait enlevé l'amour. Mais plus le défi était grand, plus Dante était partant.

"Non petite princesse, tu ne joues pas avec les gens, tu fais pire... " Son regard la pénétrait sans scrupules, souriant avec sournoiserie tandis qu'il laissait un vide assez bref emplir leur espace, l'invitant à s'interroger sur ce que voulaient dire ses propos. "Tu joues avec ta propre vie. "

C'était ce qu'elle faisait en venant ainsi affronter Dante. Que savait-elle de lui pour ainsi oser l'aborder? Avait-elle seulement réfléchi à cet acte ridicule? Il était accusé d'homicide. Certes, c'était un homicide involontaire, mais il avait trafiqué, il avait dealé. Il n'était pas sans danger. Cependant la Hamilton s'avançait sur un terrain dangereux elle aussi. Se plaisait-elle dans ce tourbillon périlleux? Son doigt vint titiller son torse sur un air de menace. Dante baissa son regard sur cette main qui se permettait de le toucher de la sorte. Il attrapa son doigt entre ses mains et la fit retomber, d'un regard sombre.

" Tu te prends pour qui fillette?" Son air n'annonçait rien de bon. Agaçé par le fait qu'elle lui demandait des comptes, Dante avait perdu son humeur jouette. "Tu crois quoi? Que je vais te donner des explications? Tu crois que t'es ma mère? " D'autant plus improbable qu'à sa propre mère, il n'aurait rendu aucun compte. Cette lâche l'avait abandonné à  son triste sort alors qu'il n'était qu'un nourrisson. Les gens les regardaient et Dante détesta cette attention indésirée. Theodora était en train de souiller son lieu de détente. "Suis-moi." C'était un ordre. Comme s'il avait parlé à une sbire qui lui devait obéissance. Dante rentra dans les toilettes des hommes, incertain qu'elle s'exécuterait. Mais qu'elle le fasse ou non, il savait qu'il refusait de s'offrir en spectacle pour les autres clients du café. Ici, au moins, il serait à l'abris des regards indiscrets. Pourquoi se soumettait-il à ce jeu débile?

Parce qu'il en avait envie...

Et les envies de Dante étaient toujours dangereuses. Dangereuses au point de détruire des vies. Dangereuses au point qu'il pouvait se perdre dans leur tumulte. Dangereuses au point qu'il pouvait proposer à une femme qu'il jugeait être une ennemie de venir le rejoindre dans un lieu assez exigu. Theodora provoquait sa fascination et il avait envie de jouer. Tous deux exerçant ainsi une obsession peu recommandable sur l'autre.

Seul dans les toilettes, Dante se disait qu'elle ne viendrait pas. "Elle ne viendra pas, elle ne viendra pas, elle ne viendra pas..." Cela tournait dans sa tête comme un mantra. Ce n'était pas un doute ni une crainte, c'était au contraire un espoir. Car si Theodora venait là, ce serait leur perte à tous les deux. Dante naviguait dans des eaux dangereuses en se rapprochant aussi sensiblement de l'ex du mort. Elle jouait avec ses pieds et cela l'énervait. Combien de sang froid aurait-il pour faire face à la situation? Il n'en savait rien. Il venait déjà de donner un ordre qui était en vérité un aveu de faiblesse. Car faire une scène devant tout le monde ne le gênait pas. Mais quand il s'agissait de son passé, de cet homme qu'il avait tué, de cette femme qu'il avait laissée amputée d'un fiancé... il ne voulait pas que tout le monde sache. Il ne se souciait pas de leur opinion, ça non. Mais il ne supportait pas qu'on lui accorde de l'attention pour des produits de leur imagination. Que les gens détestent Dante, c'était son plus grand plaisir. Cependant, il aimait que cela soit justifié. Et l'étiquette de meurtrier, elle n'était pas correcte.

Regardant son reflet dans le miroir des toilettes, il se demande ce que ça peut faire à cette femme de le voir. Comment se sent Théa face à celui qui lui a retiré la chance de poursuivre sa vie de pimbêche avec son histoire à l'eau de rose? Il a bien envie de lui dire que si elle pense qu'il a détruit sa vie, elle se trompe. Dante n'a fait qu'écourter une histoire qui aurait tourné au vinaigre quoiqu'il arrive. L'amour n'existe pas.

La porte s'ouvre et le coeur de Dante manque un battement. Qu'est-ce qu'elle fout là? Tellement choqué qu'elle soit finalement venue, il en oublie presque que c'est lui qui lui a ordonné de venir. Elle bredouille des questions qui sont destinées à gagner du temps. Dante n'a aucune intention de répondre à ces balbutiements d'enfant égarée. Si elle ne voulait pas venir, elle ne venait pas. A quoi est-ce qu'elle s'attend? A ce qu'il la prenne ici dans ses bras et lui dise pardon pour les torts causés? Parce qu'il aurait été gêné de le faire devant les clients du bar. Il a envie de rire. Il rirait d'autant si elle savait que tous s'imaginent qu'ils sont venus ici pour s'envoyer en l'air. Car Dante est coutumier de ce genre de faits. Ce n'est pas très récurrent car les toilettes publiques sont assez répugnantes et après avoir échappé à une tentative de viol en prison, il n'est pas forcément excité par ces endroits délabrés mais il s'est déjà laissé aller à des pulsions avec des femmes de passage qui fréquentaient le café.

"T'es vraiment idiote. Qu'est-ce que tu fiches ici? "

On pourrait dire qu'il souffre le chaud et le froid mais dans son cas, il souffle du froid et du plus froid. La glace semble être ce qu'il respire et le matériau duquel est composé son coeur. Ou peut-être pas. Plutôt la pierre. Car la glace pourrait fondre alors que rien ne semble pouvoir ébranler le voyou au sourire espiègle.

Theodora voit juste en parlant de comment il procède. Mais sans s'en rendre compte, elle se met sur son tableau de chasse comme si cela était normal. Dante sourit vilainement.

"C'est pour ça que t'es ici? Tu voudrais savoir ce qui se passe après? "

Il fait un pas vers elle et cette fois ne se retient pas. Sa main parcourt son épaule et remonte dans son cou, caressant ses veines et s'arrêtant sur sa joue. Son regard plonge dans celui de Theodora et il achève d'un:

"Tu sais très bien ce qui arrive après."

Son sang le brûle. Il a envie de lui montrer cet après. Dante lui-même ne comprend pas pourquoi il se retient. Mais le fantôme du décédé semble exercer une force pesante sur lui. Le regard de Theodora est le même que lors de l'accident. Il est perçant et elle soutient le sien sans une once de difficulté, du moins en apparence. Dante l'attrape par la hanche et la rapproche de lui d'un coup brusque. Ce n'est pas pour la violenter mais c'est un élan spontané, destiné à ne plus lutter contre son désir de la dominer totalement.

"Pourquoi tu es là Princesse? Dis-moi la vérité. Toi et moi on sait que t'es pas du genre à traîner dans les toilettes de lieux comme celui-ci, alors qu'est-ce que t'attends? "

Ses yeux descendent sur ses lèvres. Il les dévore sans aucune gêne. Dante lui a dit qu'elle aurait mieux fait de partir mais elle n'a pas saisi son invitation. Ce n'est pas dans ses manières de se retenir. Quand il veut quelque chose, il se sert. Et là, la proie est venue toute seule mettre ses pattes dans le piège. Elle a accepté d'entrer toute seule dans la cage. La question qu'il a envie de lui demander est de savoir de quoi elle a peur. Mais Dante n'a pas agi. Avec n'importe quelle autre, il aurait déjà attrapé son visage pour en faire un festin langoureux. Sauf qu'ici, il est dans le désir frustré. Pourquoi? Parce qu'elle n'est pas une autre. Parce que Theodora fait pulser ses veines d'une manière improbable. C'est l'adrénaline qui le domine, c'est l'envie de jouer avec le feu. Mais il craint qu'en jouant avec ce feu, les étincelles ne puissent être contenues. Car il s'agit d'une toute nouvelle chose, d'une toute nouvelle expérience. Non pas parce qu'elle a souffert comme nulle autre de par sa faute. Mais parce qu'elle est conçue pour le détester. Et la haine de Theodora, il la sent dans le creux de son ventre. Elle l'anime en tant que répulsif et en tant qu'aphrodisiaque.

Dante avait passé des nuits entières à revoir le visage fermé de Theodora. Il l'avait imaginée et reconstruite selon ses souvenirs, cherchant à percer le secret de ces yeux qui l'avaient sondé jusqu'à la moelle. Mais dans ses fantasmes les plus périlleux, il ne s'était jamais rapproché de cette idée saugrenue. Etre avec la brune, seuls, dans des toilettes publiques à discuter de ce qui s'était passé ce jour-là. Sauf qu'ils ne parlaient pas. Dante ne comptait pas discuter de ce qu'il avait fait ou non. Il avait juste voulu s'éclipser. Il avait pensé qu'elle lui ferait faux bond. Mais encore une fois, Theodora prouvait qu'il ne comprenait rien à cette femme. Elle était un vrai mystère.

Seuls dans cet endroit, Dante jouait de plus en plus avec le feu. Et au passage, il jouait avec les pieds de son interlocutrice. Il ne pouvait réellement penser qu'elle venait pour une aventure vite fait contre le mur froid des commodités. Et pourtant, une part de lui ressentait l'appel de détresse de la brune. Tel un fauve en cage, Theodora semblait parler avec lui au travers d'un langage télépathique. Dante ressentait des vibrations anormales provenant d'elle. Réduisant la distance entre eux, il sentait son propre pouls s'accélérer et il aurait pu jurer que leurs coeurs battaient à la même vitesse. Ce désir était partagé entre l'envie d'assouvir quelque chose de terriblement mal et l'envie de détester l'autre. Theodora repoussa l'idée qu'elle pouvait vouloir de ses avances. Après tout, pourquoi aurait-elle voulu cela? Dante voyait son propre reflet au-dessus de l'épaule de Theodora, il voyait le dos de la femme et son visage en décalé. Ensemble, ils étaient deux corps qui se mêlaient dans les noirceurs. Seule la lumière provenant du lavabo était encore trop forte pour les laisser s'abandonner au chaos qui régnait sur leurs âmes.

"Je ne crois pas."

Cette phrase courte était percutante. Elle laissait l'interprétation libre à deux sens totalement opposés. Il ne croyait pas. Il ne croyait pas car il savait. Ou il ne croyait pas car il n'était pas sûr. Mais tous deux connaissaient le réel sens qui se trouvait derrière ses mots. Dante se demandait lui-même d'où il tirait cette conviction qui faisait son sang vibrer si fortement dans ses veines. Et alors qu'elle sortait un couteau pour le pointer devant Dante en tant que menace, l'homme sentit ses entrailles se resserrer avec un sentiment encore plus fort. Elle ne lui faisait pas peur. Mais il admirait son intelligence et sa force. Néanmoins, il savait que ce couteau de cuisine ne ferait pas le poids contre lui. Pensait-elle qu'elle était en sécurité avec ce bout d'acier entre les doigts?

"Je sors de prison chérie. Des plus grands et plus forts que toi m'ont menacé avec des couteaux plus aiguisés que ça."

Son regard la fusillait sans ciller. Il ne la lâcherait pas. Maintenant qu'elle était dans l'antre du loup, Dante était prêt à tout pour poursuivre cet échange dont les conséquences seraient violentes pour chacun d'eux. Il n'avait donc pas reculé. Il la laissait tenir son arme volée sur une table très probablement, là tout près de lui sans même avoir l'air d'être inquiet.

"Je ne sais pas ce que tu espères faire de ça. Mais de mes affronts précédents, le seul qui est parvenu à me toucher, n'est parvenu qu'à me laisser ça comme marque de sa bêtise."

Dante relève son t-shirt et laisse apparaître une cicatrice sur l'abdomen. D'à peu près 7 centimètres, elle aurait pu lui être fatale. Il avait alors fait un séjour d'une semaine à l'infirmerie. Ce n'était pas nécessaire mais il faisait les yeux doux à une empotée qui travaillait là et il était parvenu à prolonger son séjour aux soins.

"Tu ne veux pas savoir ce qui est arrivé au gars qui m'a fait ça."

Il n'avait toujours pas bougé. Le couteau pouvait faire des dégâts mais Theodora ne faisait pas le poids. Si elle bougeait pour inciser, Dante savait qu'il n'aurait qu'un mouvement à faire pour la plaquer contre le mur. Et secrètement, il espérait qu'elle lui en donnerait l'occasion. Depuis le début de cet échange, il ne souhaitait qu'une chose : dominer cette créature qui avait eu l'audace de le défier et de lui demander des comptes. Mais au lieu de se prêter à ce jeu, il avait envie de provoquer les ténèbres de la belle en face de lui. Se rapprochant encore un peu, autant que le couteau le permettait, il laissa la lame toucher la peau de sa gorge.

"Vas-y, fais-moi mal. Tu as l'air d'en crever d'envie."

Dante n'était plus qu'animal. Ses pupilles dilatées faisaient ressortir la bête. Fourbe et sauvage, il n'avait plus une once d'humanité en lui. Si elle se donnait la peine de couper dans sa chair, il n'en serait pas déçu.

"J'ai tué ton... comment encore... Matthew. Ton Matty chéri est mort à cause de moi. Qu'est-ce qui te retient?"

Il releva sa main pour aller la poser sur celle de Theodora, entourant ses doigts et étant capable de la faire dévier à tout moment. Son regard la perçait avec une intensité rare. Il n'avait qu'une envie mais l'animal se retenait. Ce n'était pas dans sa nature d'épargner une proie. Mais celle-ci n'avait pas encore suffisamment couru pour qu'il se jette dessus et l'abatte d'un coup de croc à la gorge. Alors, il patientait, laissant la chasse continuer, laissant la gazelle penser qu'elle avait une chance de s'en sortir indemne. Alors qu'ils savaient tous deux que des coups mortels avaient déjà été portés entre eux. Chacun saignant la nuit tombée, saignant des plaies du souvenir d'un mort qu'il n'avait pas voulu voir décéder.

Dante jouait avec le feu uniquement quand il aimait l'enjeu. Quel était l'enjeu du jour? Il n'en avait pas la moindre idée. Mais Theodora semblait une partenaire indiquée pour un tour sur une piste peu fréquentée. Là où on ne l'attendait pas, la jeune femme déboulait avec ses petits souliers mais elle savait mettre des coups de pieds fermes et décidés. S'il était un connard, elle était une inconsciente. Car Dante n'était pas que ça. Il cumulait les défauts. Et Theodora ne savait pas à quoi elle s'exposait en entrant sur ce terrain miné. Elle ne craignait visiblement pas la mort... ou peut-être que si. Ce couteau qu'elle pointait sur lui d'un air menaçant, n'était-ce pas la preuve qu'elle avait peur de ce qu'il pourrait faire? Mais se sentait-elle en danger mortel? Ou ses peurs tournaient-elles autour d'autre chose? Dante n'avait rien pour le dire. Il devait se fier à son intuition. Et le cancre de la classe était assez intelligent pour un mec dont le bulletin était en dessous de la moyenne. La raison en étant qu'il préférait cacher ses compétences intellectuelles. Là, il n'avait pas besoin de réfléchir beaucoup pour savoir comment se sortir de cette sale situation. Mais il ne voulait pas s'en sortir. Dante voulait voir jusqu'où la brune irait. Et c'est ainsi qu'il resserra le danger sur lui, poussant Theodora à commettre un crime. Car les coups et blessures étaient punissables par la loi. Il était le mec qui avait tué son fiancé, tout le monde croirait qu'elle voulait se venger. Certes, sa peine serait donc atténuée par des circonstances atténuantes. Mais elle aurait probablement une lourde amende. Seulement, elle pourrait dire que c'était de la légitime défense. Cependant, Dante savait que cela ne tiendrait pas la route. Il l'avait fait venir dans les toilettes pour hommes. Il n'y avait pas de raison qu'elle y soit, aucune autre raison que de l'y avoir suivi car des témoins l'avaient vue s'y rendre volontairement. Peut-être même l'avait-on vue s'emparer du couteau. Dante savait que les faits jouaient en sa faveur si elle décidait de presser l'ustensile de cuisine contre son cou plus que de raison.

Mais Theodora ne réfléchissait probablement pas aussi loin. Elle ne faisait que répondre à ses instincts. Le premier lui dictant de crier sur cet homme qui la mettait dans une si mauvaise posture. Cet homme qui lui rappelait sans une once d'empathie, qu'il avait tué Matthew.

Il sourit d'un sourire mauvais quand elle lui dit qu'il méritait de crever. Dante aurait bien aimé répliquer mais elle ne lui en lissa pas la chance. Se débattant avec ardeur, elle repoussa celui qui pouvait presque être considéré comme son agresseur. Le couteau glissa de ses mains, entaillant au passage le cou qu'il retenait en otage. Theodora rattrapa le couteau à pleine main mais Dante ne se souciait pas de ça. Il avait porté la sienne sur sa gorge et regardait l'entaille dans le miroir des toilettes. C'était superficiel, mais il y avait une trace de sang qui s'échappait de sa peau, narguant l'américain. Dante se retourna vers Theodora qui analysait sa propre blessure.

"Mademoiselle Hamilton, vous venez d'entrer dans l'histoire. "

Il aurait même dit la légende mais il n'aurait jamais accordé autant de crédit à une simple femme. Cependant il était certain que Theodora était la première de son espèce à avoir blessé physiquement Dante. Aucune femme auparavant n'avait eu ce toupet et encore moins la force. Evidemment, il s'était pris des gifles. En bon salaud, il ne pouvait pas toujours y échapper. Mais là... c'était du jamais vu. Son sang était mêlé à celui de la femme et il regardait la lame du couteau avec une fascination non dissimulée.

"Tu voulais créer un lien de sang entre nous?"

Ironique, Dante la regarde avec un sourire narquois. Il attrape quelques feuilles dans le distributeur à papier destiné à sécher les mains et se rapproche de Theodora dans un geste totalement inédit chez lui. Il attrape la main ensanglantée et presse le papier dessus. Ce n'est pas de la gentillesse, il en est dépourvu. C'est une attirance incompréhensible qui le pousse à réduire la distance qui s'est installée, à revenir auprès d'elle et à regarder le mal qu'il a fait malgré lui. Dante retire la serviette en papier de la main de son adversaire du jour et regarde la coupure.

"Voilà ce qui arrive aux petites princesses quand elles s'éloignent de trop du château. "

Dante a subi sa peine. Il n'a plus rien à faire ici et il sait qu'il est temps pour lui de retourner chez lui pour aller panser sa plaie. Il attire la main de Theodora et dépose un baiser léger sur sa paume. Léger mais appuyé pour qu'elle ressente la douleur que ses lèvres peuvent lui infliger.

"Restez loin de moi Mademoiselle Hamilton, restez loin de moi. "

Mise en garde ou conseil amical? Lui-même ne le sait pas. Il fouille dans sa poche à la recherche d'un billet tandis qu'il sort des toilettes. Dante dépose un billet sur la table pour régler ses consommations et sort de là sans un regard en arrière. Habituellement, il ne regarde jamais derrière lui. Mais l'envie est là cette fois. Il voudrait voir le regard noir de la belle une dernière fois. Dante tourne au coin de la rue et ferme les yeux. Il n'a pas besoin de la revoir pour qu'elle demeure présente dans son esprit. Sa manière d'être, ce visage fermé, chacun de ses traits est ancré en lui. Il rouvre les yeux et soupire. Fuck. Elle le hantait déjà, ce sera pire désormais. Dante se passe la langue sur les lèvres et il sent le goût de son sang. C'est totalement décalé, sale et démesuré. Mais leur lien est tellement incompréhensible que ce sentiment qu'il ressent au goût du sang de Theodora ne le surprend même plus.