Stupid shit is eating up my mind - so eat up, eat up || Adam

gotta be a baddie or they hatin' on me.

► Jeans -  Rubi

Certains matins sont plus difficiles que d’autres. Certains matins, on peut rester au lit, d’autres non. Ce matin, la question ne se pose même pas. Je suis tombée du lit avant que le soleil ne tombe du sien, et j’ai passé bien trop de temps à regarder dans le vide sur le canapé. Le thé qui refroidit sur la table basse alors que mes cheveux tiennent dans un chignon improvisé sur le haut de ma tête, un sweat trop grand pour me tenir chaud, pour le côté cosy.  Ce matin, aucune question ne se posait. Seulement des réalités.

Tout avait dû passer en second plan quand Falco s’était pointé. C’est pas qu’on a grand chose à se dire. C’est pas que j’ai envie de lui dire grand chose ces derniers jours de toutes les façons. Je préfère me contenter du minimum et dans le fond, ça ne change pas vraiment de l’habitude. Je me tais, pour éviter de lui cracher à la tronche des trucs qu’il ne doit pas entendre. Pour son bien. Pour le mien. C’est un peu une mission d’intérêt général que de garder le silence, en vrai.

Et puis, le silence absolu et la solitude étaient revenus. Falco avait disparu, me laissant seule avec moi-même. Quand il était là, j’étais seule. Mais seule avec lui, et c’est différent.

Le mode autopilote était plus ou moins activé. Comme les autres jours, il me faudrait me soumettre à des tâches domestiques sans aucun intérêt. Les seules choses que Falco ne discutait même pas dans le fond. J’étais ici, j’étais sous contrôle ou presque. Je ne risquais rien. Il ne risquait rien. Aussi simple que ça. Pourtant, aujourd’hui, je n’aurais pas le choix. Aujourd’hui, il fallait remplir un minimum le frigo et les placards. C’était pas pour ses actes de présence irréguliers. Mais, il râlerait sans aucun doute si il n’y avait plus de café.

Du cash qui traîne dans le salon, les clés d’une de ses voitures, et je suis dehors, au volant de la bête. Je ne sais même pas ce que c’est comme voiture et je m’en fiche sincèrement. L’important est seulement d’arriver à bon port et de pouvoir caler quelques courses dans le coffre ou sur la banquette arrière. Quelque chose que Falco ne semble pas capter quand il est fier de ramener un nouveau jouet brillant.

Celui-ci est brillant à souhait et sent le cuir tendre à l’intérieur alors que j’appuie sur l’accélérateur comme si je voulais accélérer le temps, accélérer ma vie pour rapidement passer à autre chose. Comme si cela allait changer quelque chose. Comme si cela allait effacer le passé. Comme si cela allait effacer le regard des gens alors que j’avais fait les courses dans une petite robe à fleurs probablement trop courte et trop moulante mais adaptée au temps déjà écrasant de la Louisiane en ce début de Mai.

Les courses posées dans leur sac en papier sur le siège passager, il me reste un arrêt à faire. La fleuriste du centre-ville. Cette petite boutique charmante ou ça sent toujours bon, coincée entre un café et un petit restaurant local. Les fleurs sont les rares beautés dont je ne me lasse pas et que j’aime avoir seulement pour me sentir un peu chez moi, chez lui.

Les rues défilent et j’y suis presque. Pourtant, ce qui attire mon attention alors que j’approche au ralenti d’un feu, c’est une boutique pour enfants que je n’avais jamais remarquée jusque-là. Et c’est con, putain, de se laisser distraire pour si peu. C’est vraiment con, surtout aujourd’hui, surtout maintenant. La petite layette de coton blanc immaculé qui brille presque me hurle d’imaginer ce à quoi mon bébé aurait ressemblé dans ça.

Et je n’ai pas le temps d’y penser que je sens la voiture s’arrêter et mon corps être entraîné et aller taper contre le volant. Un impact minime, puisque je freinais à cause du feu rouge. Mais, un impact tout de même. Je souffle et me tape doucement le front contre le volant, fermant les yeux, les mains serrées sur le cuir. Putain de merde. Falco va être furieux.

@Adam Lockhart

La prochaine équipe était venue prendre la relève de la planque. Enfin. T’en pouvais plus d’avoir le cul vissé sur le siège de ta bagnole. Tu l’aimais, ta machine, mais là tu saturais. Et t’étais pétri de courbatures. Une bonne douche, un bon repas et tu serais prêt à aller te coucher sans autre forme de procès. C’était tout ce à quoi tu aspirais. Demain, c’était ton jour de congés dont tu n’aurais pas à refoutre le nez dans cette affaire qui te tapait sur les nerfs. Demain, tu aurais tout le loisir d’accorder tes heures de liberté à Hazel et Wendy. C’était ce dont tu avais besoin pour décompresser, pour te sentir apaisé. Peut-être que tu devrais faire un petit crochet par leur appartement. Pour t’assurer que tout est en autre, que l’autre parasite n’a pas fait une nouvelle tentative. Tu actives ton clignotant, change de file et de direction. Cela ne prendrait pas longtemps. Tu voulais juste t’assurer qu’elles étaient toutes les deux en sécurité. Tu ne fermerais pas l’heure de la nuit sinon.
Tu t’arrêtes au feu, le regard perdu au loin. C’est fou comme la vie était simple jusqu’ici et à quel point vous vous étiez retrouvés soudainement pris dans un maelström qui vous dépassait. Mais tu étais et tu restais un roc. Tu n’avais pas l’intention d’être déraciné ou de laisser quique ce soit se faire emporter dans le torrent de l’existence. Tu allais faire ce que tu fais toujours : servir et protéger.
Tu te penches légèrement pour changer la station de radio lorsque le choc survient. Oh. Putain. Ta caisse. Ta caisse, putain ! Tu y tiens comme à la prunelle de tes yeux. C’est le seul excès que tu t’es permis avec la fortune familiale, ton seul excès, ton seul caprice, ton bébé. Et quelqu’un venait de l’emboutir. Tu lèves des yeux qui doivent dégouliner de rage vers ton rétro et tu lui fais signe de se garer. Oh, il n’avait pas intérêt à s’enfuir. Tu n’aimerais rien plus que de le prendre en chasse avec le gyro et de l’écrouer pour délit de fuite. Tu te gares et sors de la voiture, une colère froide tend chacun de tes muscles alors que tu fais le tour de ton véhicule pour examiner les dégâts. Un grondement sourd s’échappe de ta gorge lorsque tu vois de quoi il en retourne. Tu te retournes alors lentement vers le coupable. Ou plutôt la coupable. Si tu es attendri ? Pas le moins du monde non. Ta colère était tout aussi intense, pas de jalousie entre les genres.
« Je peux savoir où vous aviez les yeux ? »

gotta be a baddie or they hatin' on me.

► Jeans -  Rubi

Quand je relève la tête, je vois le conducteur devant faire des signes, furieux. Comme si la fureur de Falco n’était pas suffisante, j’allais pouvoir m’échauffer avec celle d’un inconnu. Super. Je soupire. Je veux hurler mais je ne peux m’en prendre qu’à moi. J’aurai dû faire attention, je suis trop distraite ces derniers temps, pour rien. Pour tout. C’est affolant. Et dangereux.

Marche arrière, marche avant, je me gare sur le côté. Je jette un oeil à l’autre voiture. Quelques rayures, une légère bosse. Deux fois rien. Je prie seulement que la voiture de Falco soit intacte. Qu’on arrive à régler ça à l’amiable, ça m’aiderait bien. Je pourrais dire à Falco que j’ai retrouvé la caisse dans cet état sur le parking, et voila… Encore que… Il serait capable d’aller harceler le supermarché pour avoir les vidéos.

L’autre conducteur fait déjà le tour de sa voiture et j’ai la sensation qu’il va en faire des caisses. Encore un homme qui cherche son égo avec une jolie voiture ? En attendant, j’extirpe ma carcasse de la voiture. Non, je n’en ai pas spécialement envie, mais, je n’ai absolument pas le choix.

Je regarde l’homme qui s’approche et me balance furieux une question qui ne mériterait pas de réponse vu son ton. « Je suis désolée. » Pour le moment, je me contente de ça alors que je fais le tour pour observer l’avant de ‘mon’ véhicule. Rien de grave, mais, c’est esthétique et ça devra passer par le garage. Super.

« J’ai été distraite. » Je balance ça sans essayer de savoir si il m’entend ou pas. Non, ça m’importe peu. Là, j’essaye surtout de mesurer le degré de colère que Falco va atteindre quand je vais lui dire, et la magnitude du séisme quand on va se retrouver devant la voiture et qu’i va voir les dégâts. Je pense que l’autre conducteur devrait me rouler dessus tout de suite, ça vaudrait mieux, pour tout le monde.

Dans la vérité absolue, je me contente de me retourner pour le regarder. Il est jeune, dans mes âges. Il n’a pas l’air commode, mais, je ne peux pas lui en vouloir. Je suis en tort, je le sais. Ce que je ne sais pas, c’est comment ça se passe dans l’absolu. Un instant, je panique que la police soit obligée d’intervenir. Il ne manquerait plus que ça.

Une vérification d’identité, une vérification du permis… Ils constateraient bien vite qu’un truc cloche. J’en suis sûre. J’évite la flicaille depuis que je suis arrivée ici. Ma fausse pièce d’identité y est probablement pour quelque chose. Enfin, ils n’ont rien vu au DMV quand ils m’ont fait mon vrai permis, alors…

Je le regarde et je me frotte la nuque d’une main distraite. « Je suis désolée, je…. Comment ça doit se passer maintenant ? Vous n'avez rien ?»

@Adam Lockhart

« Je suis désolée. J’ai été distraite. » Tu te passes une main sur le visage. Ça, pour être désolée, elle allait l’être lorsqu’elle allait voir le montant de la facture. Ce petit bijou était une voiture de collections, dont les pièces étaient rares et difficiles à trouver, et donc très onéreuses. Elle avait intérêt à avoir un compte en banque aussi rempli que sa voiture hors de prix et tape à l’œil semblait l’indiquer. Mais elle a pas l’air plus concernée que ça. Non, elle a l’air plutôt ailleurs, plutôt distraite. Visiblement cette erreur d’attention ne lui avait aucunement servi de leçon. Tu sentais l’agacement te piquer le nez et tu t’en pinças l’arête pour ne pas perdre ton sang froid de suite. Du calme, Lockhart. Tu n’allais pas démembrer cette nana, merde. Tu étais bien placé pour savoir que le calme était le meilleur état d’esprit pour résoudre des conflits. Tu avais eu affaire à des situations bien plus tendus avec le travail. Mais lorsque ça touchait à ta voiture, tu n’étais vraiment plus rationnel le moins du monde. « Je suis désolée, je…. Comment ça doit se passer maintenant ? Vous n'avez rien ?» Tu la regardes vraiment pour la première fois. Elle est jeune, plutôt jolie. Aucun, très jolie mais t’es trop énervé pour lui accorder plus de crédit que ça. Mais elle a l’air sincèrement embêté. Bon. Tu redescends d’un étage ou deux et décides de prendre les choses en main. « On va faire un constat. Il va me falloir vos papiers d’identité, votre permis et la carte grise du véhicule. » Si protocolaire. Mais c’est pas comme ce n’était pas quelque chose que tu avais dit et rabâché à l’époque où tu n’étais qu’un simple patrouilleur. Tu retournes vers ta voiture pour en sortir le nécessaire, le constat et de quoi écrire surtout avant de revenir entre les deux véhicules.

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► Jeans -  Rubi

L’ennui et l’inconfort me gagnent de minute en minute. Je ne sais pas ce qui me perturbe le plus. Le fait que j’ai abîmé la voiture parce que j’étais clairement dans des vapes que je devrais éviter. Parce que l’éraflure sur la voiture va me coûter cher… Car je sais que Falco ne me laissera pas m’en tirer aussi facilement que ça. Ou si finalement, j’ai plus peur que cette histoire prenne des proportions dramatiques avec une intervention de la police. J’y songe, parce que malgré tout, nous sommes arrêtés là et le conducteur de l’autre voiture ne semble pas décolérer depuis qu’il est descendu du véhicule.

Finalement, quand il reprend la parole, il à l’air moins énervé. Par contre, il est terriblement directif et il me fait penser aux flics de Miami qui nous contrôlaient sur le trottoir. Frisson que je camoufle alors que je me dirige côté passager pour récupérer mon sac à main. Lui est déjà là, papiers en main et j’espère bien qu’il va tout remplir car la paperasse américaine, ce n’est clairement pas ma tasse de thé.

Je pose le sac sur le capot de la voiture de Falco et commence à fouiller dedans. « Pourquoi faut-il tout ça? » Je l’interroge, parce que je n’y connais rien. C’est pas tous les jours que ça m’arrive. D’ailleurs, c’est la première fois que ça m’arrive. Comment suis-je supposée savoir ce qui m’attends ? Comment suis-je supposée réagir ? Est-ce que je dois lui sortir le coup des larmes pour essayer de m’en sortir ? Peut-être. Probablement. Pourtant… J’en suis bien incapable alors que j’extrais mon ID, mon permis et les papiers de la voiture. « C’est la première fois que ça m’arrive, je… Je suis vraiment désolée. » Je m’excuse plus ou moins. Je justifie comme je peux le fait que je n’y connaisse rien ou presque.

« Ce n’est pas ma voiture. C’est celle de mon fiancé. C’est problématique? » Je demande, mais j’espère très sincèrement pouvoir laisser Falco en dehors de tout ça pour quelques temps encore. Il ne manquerait plus que les humeurs de Lowe viennent se promener par ici… L’histoire est déjà assez compliqué sans rajouter tout de suite une variable instable qui viendrait complexifier l’équation.

@Adam Lockhart