Nuit mouvementée, enchaînée à des musiques conçues pour vous écraser le crâne plutôt que pour le goût des bonnes mélodies. Ces deux jours off me faisaient un bien fou. Je relâchais les tensions, oubliais mes appréhensions. Sauf qu'à chaque montée : une descente. Abandonnée par mes compagnons de fête, je m'étais échouée, comme souvent, dans ce dinner austère à dix minutes de marche du Kraken. Cela faisait deux semaines que je n'étais pas venue.
La dernière fois, je n'en avais quasiment aucun souvenir hormis le fait que je n'étais pas seule et que l'alcool nous tenait encore en ses serres. Nous étions bruyants, un gars avait joué les gros lourds avec la serveuse et la robe que je portais cette nuit-là avait encore une auréole rappelant la tache d'un café renversé ou que sais-je...
À l'aube nouvelle, j'avais repris mes esprits. L'air frais printanier avait un effet revigorant. Ma tête me faisait déjà mal, mes cheveux et maquillage en bataille en connaissaient la raison. J'entrai dans la gargote et m'installai dans une table au coin de la salle. Sans bonjour, sans regard, juste à m'affaler sur la banquette et flanquer mes coudes sur la table. Mon visage noyé dans mes paumes, j'expirai longuement avant d'être victime de mon haleine gorgée de rhum.
Je me redressai et posai un regard insistant sur la serveuse sans même m'en rendre compte. Mes yeux étaient perchés dans le vide, en suspend dans l'inconscient. Inutile de regarder la carte, je commanderai comme à l'accoutumée. Elle n'avait pas beaucoup de clients mais tardait à venir à ma table. Je levai les yeux au ciel et m'enfouis un peu plus dans le dossier de la banquette, consultant mon téléphone pour m'occuper le temps que la serveuse daigne approcher.
Sujet: Re: morning backfire / hazel & kawther ☆☆ Mar 26 Mai - 0:32
Kawther & Hazel
morning backfire
Le service commence à peine et elle a déjà hâte de rentrer chez elle. Une longue journée qui l’attend. Interminable. A devoir supporter des clients tous plus chiants les uns que les autres. Voilà bien longtemps qu’elle ne sourit plus à son travail, Hazel. Voilà des années que chaque jour, elle traine les pieds. Aujourd’hui ne fait pas exception. A l’arrière du Dinner miteux, elle attrape son tablier merdique pour l’enfiler. Aujourd’hui, elle fait l’ouverture, une véritable corvée. Elles ne sont que deux, une collègue et elle, pour gérer le restaurant le temps que les heures défilent jusqu’à 9h30, où d’autres de leurs collègues viendront en renfort.
Peu de gens en général aux première lueurs du jour. Quelques habitués qui viennent prendre leur petit déjeuner avant d’aller travailler. Et d’autres qui n’ont pas fermé l’œil de la nuit qui se pointent pour un petit encas avant d’aller se coucher. Les cafetières en route, elle s’occupe de servir les premiers clients en leur souhaitant à peine bonjour. De toute manière à cette heure, tout le monde a encore la tronche dans le brouillard. La matinée est censée se passer tranquillement, comme la plupart du temps. Le point positif c’est que son patron n’est pas encore là. Un peu de répit avant qu’il ne débarque, dans quelques heures, pour achever de lui gâcher la journée. Pourtant, lorsque son regard se pose sur l’une des clientes affalée à une table dans un coin, l’agacement pointe déjà le bout de son nez. Enervée si tôt, ça ne devrait pas être autorisé.
Elle se souvient de cette énergumène et de sa bande de potes. Des imbéciles bourrés qui avaient dévasté le resto en très peu de temps. Et qui a payé les pots cassés ? Hazel, évidemment. Son patron ne l’avait pas loupé ce jour-là et une fois de plus, elle s’était pris un savon. Passablement dégoutée de revoir cette femme, elle prend son temps avant d’aller la servir. Ça ne l’enchante pas, on ne va pas se mentir. Lorsqu’enfin elle n’a plus rien à faire, elle se dirige vers elle, le visage fermé, pas aimable pour un sou et les mains sur les hanches. « Vous voulez quoi ? » La rancœur au bord des lèvres, Hazel la fixe sans sourciller. Le regard noir transparait sans mal qu’elle lui en veut. Pas de bonjour, pas de politesse, rien. Cette femme ne le mérite pas.
Amertume sur le visage, la serveuse ne semblait pas être dans un beau jour. En même temps... qui pouvait l'être à travailler à une heure pareille ? J'ai toujours été un oiseau de nuit. Plus par la force des choses que par conviction, mais cela m'allait. Travailler au Kraken était d'ailleurs une parfaite aubaine pour ma physiologie ! Visiblement, tout le monde n'était pas heureux de son rythme de travail. À moins que ce soit simplement moi qui lui inspire cette mauvaise humeur... Je croisais les doigts pour que ça ne soit pas le cas.
Un sourire forcé, de ces sourires commerciaux qu'on renifle à quinze kilomètres à la ronde. Ce n'était pas après cette nuit que j'allais être des plus diplomates... « Un milk-shake fraise et des œufs brouillés, si ce n'est pas trop demander » prononçai-je avec ma voix rauque de lendemain de soirée.
J'avais besoin d'éponger l'alcool et surtout de faire passer cet arrière goût persistant de rhum mal dosé. Cela me mettrait un coup de fouet suffisant pour ne pas rentrer chez moi en rampant. Je n'étais pas pressée de retrouver mon trou à rat, mais il valait mieux ça que de camper sur un banc public et se faire dégager par les autorités...
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Le service commence à peine et elle a déjà hâte de rentrer chez elle. Une longue journée qui l’attend. Interminable. A devoir supporter des clients tous plus chiants les uns que les autres. Voilà bien longtemps qu’elle ne sourit plus à son travail, Hazel. Voilà des années que chaque jour, elle traine les pieds. Aujourd’hui ne fait pas exception. A l’arrière du Dinner miteux, elle attrape son tablier merdique pour l’enfiler. Aujourd’hui, elle fait l’ouverture, une véritable corvée. Elles ne sont que deux, une collègue et elle, pour gérer le restaurant le temps que les heures défilent jusqu’à 9h30, où d’autres de leurs collègues viendront en renfort.
