Poison * Ian

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Les larmes ne coulent que sur les visages des gens qui sont faibles. Les larmes ne font pas de mal et pourtant, elles créent des océans insurmontables. Car une larme sur le visage tendre de sa soeur suffisait à rendre Ian fou.

Soeur de nom, tu n'es rien d'autre qu'un mirage. Le sang qui coule dans nos veines ne fait pas de toi ma reine. Car tu n'es pas mienne. Tu n'es rien. Tu n'es qu'une chienne. Abandonnée dans la nuit, tu hurles que tu veux retrouver les tiens, tu hurles que tu as été volée à une royauté que tu aurais pu aimer.

Le mal était fait. La belle voulait s'en aller. Elle avait découvert une vérité que lui connaissait depuis des années. Comment? Son père avait vendu la mèche. Alors que Ian voulait tendre une main à la malheureuse que le paternel frappait, ce dernier lui avait crié dessus. Premier rappel à l'ordre d'un homme qui l'avait mis sur un piédestal. En secret, après une bière ou deux, le Norvégien s'était confié à son fils, lui expliquant comment sa défunte épouse avait volé un bébé. Sous le choc, l'adolescent ne savait pas comment réagir à cette annonce. Il était soudain dégoûté de cette créature qu'il pensait être sa soeur. Et fasciné par le monde de possibilité que ce savoir lui offrait. Confondu entre deux sentiments totalement opposés, Ian avait été tenté d'aller cracher au visage de la Blake Reynolds. Sang impur, fausse norvégienne qui occupait son coeur alors qu'elle n'avait rien à y faire. Mais elle était bel et bien là, dans son coeur, à ronger ses vaisseaux, à le rendre fou de sa faiblesse, fou de sa fragilité. Et Ian avait tenu le coup, il avait tenu le secret. Pour eux, pour qu'elle n'ait pas à partir, pour que leur fratrie demeure intacte.

Puis... Herkja avait appris toute seule. Fouineuse indocile, elle avait ressenti le besoin de connaître la vérité. Et cette vérité avait tout emporté, tout fait éclater. Dispute entre le frère et sa soeur. Depuis combien de temps savait-il? Ian criait plus fort qu'elle. Tenté de la frapper comme leur père l'aurait fait, il se retenait. Mais Herkja partait. Les larmes sur son visage avaient un goût amer quand il vint les goûter. Lien spécial, anormal, Ian ne comprenait pas qu'elle puisse le quitter. Elle ne comprenait pas qu'il ait menti pendant si longtemps. Mais Ian était certain d'avoir fait le bon choix. En la voyant faire ses bagages, il n'avait aucun regret. L'aîné avait bien fait de lui cacher ses origines, il leur avait fait gagner quelques petites années supplémentaires. Alors qu'elle offrait la liberté à une larme supplémentaire tandis que Ian la tenait contre lui, en la regardant avec une violence sans nom, une moue de dégoût s'esquissa sur son visage. "Va-t-en Herkja. Va-t-en et ne reviens jamais." Blessé, il voulait la heurter, la violenter pour qu'elle comprenne ce qu'elle faisait. En partant, ce n'était pas les autres qu'elle rejoignait, c'était lui qu'elle abandonnait. "T'es pas ma soeur, t'es qu'une traînée américaine. Retourne chez toi." Comme une gifle, ses mots atteignirent celle qu'ils ciblaient. Et il sortit de la chambre, laissant celle qui le détruisait seule.

Et tu sais qu'elle part,
Sans un au revoir
Sans un regard
Elle part...


Lorsque la femme se dénude, l'homme regarde. Son corps entre en action et les membres sont réunis. Lorsque la femme se déshabille, l'homme désire. Mais elles avaient beau offrir leurs services au Norvégien, Ian les prenait sans les aimer. Des femmes de tous horizons, des physiques qui différaient sans cesser de se ressembler. Car pour lui, elles avaient toute l'image de sa soeur gravée dans sa tête. Il les prenait sans se soucier des sentiments qu'il brisait, sans se soucier des complexes qu'il alimentait. Ian ne voyait qu'elle, cette chétive gazelle qui était partie en courant. Mais si l'obsession avait un nom, il refusait de le prononcer. Et quand leur père demandait s'il avait des nouvelles, Ian crachait au sol et refusait d'admettre qu'il la surveillait de loin. Les réseaux sociaux avaient découvert une nouvelle Herkja, une américaine qui réussissait en tant que journaliste. Mais ce n'était pas elle. Aux yeux de tous, elle semblait heureuse. Mais Ian savait. Ian connaissait ce visage pour avoir dormi auprès de lui plus d'une fois. Herkja cachait des maux que personne ne pouvait comprendre. Personne sauf lui. Et ces maux, il les partageait. Loin d'elle, l'indépendant, le mauvais garçon ne respirait plus de la même manière. Il ressentait le besoin de venir l'aider, de la briser pour qu'elle puisse sourire à nouveau. Lien malsain, il ne savait pas à quel point. Alors, Ian prit un billet d'avion qu'il n'eut pas à payer. Des manoeuvres lui permirent d'obtenir un billet gratuitement. Et une fois arrivé à Lewisburg, où la petite se cachait avec sa nouvelle famille, il prit son temps pour tâter le terrain, pour savoir comment approcher l'animal farouche qu'elle était devenu.

Cela faisait des semaines qu'il était arrivé et pourtant, il n'avait pas encore pris contact.