clovis | everybody knows i'm a motherfucking monster

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Enfance avortée, simulacre d’enfance. Faut dire que c’est ta mère qui aurait mieux fait d’avorter. Non mais sérieusement, une danseuse de Las Vegas qui se fait mettre en cloque par un mec qui sort à peine de l’adolescence, un mec qui traîne dans des trucs louches. Il lui a dit de pas le garder, elle a rien écouté, elle a eu le môme. Le môme, c’est toi, Clovis. Mais c’est le Moran qui prend le pas sur tout le reste. Puisque t’étais là, pas question que tu pourrisses avec ta mère d’après le paternel alors il a coupé le cordon, au sens propre comme au sens figuré. Sayonara la mère, c’est au clan Moran que reviendrait ton éducation pleine et exclusive. Mais Seth Moran et ses vingt balais, c’était pas vraiment l’étoffe d’un père. Il savait pas trop quoi faire de toi, surtout qu’il fallait qu’il s’implique dans les affaires du clan. T’étais un fardeau. Un fardeau qu’il refoulait dès qu’il le pouvait. T’étais plus un petit frère emmerdant dont on cherche à tout prix à se débarrasser. T’as enchainé les nounous autant que ton père se les soit enfilées, ou peut-être que c’était dans l’ordre inverse ? Jusqu’à ce que – providence ! – ton oncle n’épouse Hera. Il y avait enfin une femme fixe dans ce monde de brutes et on avait commencé à lui refiler le mioche. Dans ce monde changeant que celui des Moran, ton point fixe, ton unique repère, c’était Hera. Elle s’est ancrée comme centre de ton univers et elle n’en a jamais bougé, n’a jamais dévié. Elle t’a offert une affection dont tu n’avais pas confiance de manquer. Elle avait aimé ce petit garçon silencieux et taciturne que tu étais, elle lui avait offert pour la première fois de l’amour maternel. Elle avait encouragé ta curiosité, alimenté ton intelligence, façonné l’homme que tu serais de manière bien plus efficace que son mari ou ton père. Elle avait ta pleine et entière fidélité, et elle l’aurait toujours.

Le clan était le prisme déformé à travers tu voyais le monde : il y avait le clan et il avait le monde extérieur, presque irréel à tes yeux. Tu allais dans une des meilleures écoles privées de la ville, tu étais un excellent élève, tu ne faisais pas de vague. Caméléon en camouflage. Mais ta réalité, c’étaient les affaires. Ton père et ton oncle avaient pensé qu’il ne servait à rien de te dorloter outre mesure et t’avais mis le nez dedans très tôt. Oh bien évidemment, tu n’avais aucun rôle, aucune fonction. Tu n’étais qu’un observateur silencieux, tu étais là pour apprendre et bien fermer ta gueule. Il n’était pas question que tu dévoiles quoique ce soit qui puisse porter préjudice au clan. C’était d’ailleurs la première leçon qu’on t’avait apprise. Comment on réglait les problèmes chez vous. Une seule méthode. Une balle dans le crâne. Enfin, quand ils décidaient d’être miséricordieux. Tu n’as jamais remis en cause ton éducation ou la cause, pour la simple et bonne raison que pour toi, tout ça, c’était la normalité. Comment le monde pourrait-il bien être ? Pourquoi en serait-il autrement ?

Conway représentait un semblant de normalité au milieu de tout ça. Tu l’avais toujours connu, ce maladroit archétype de grand frère, ce cousin qui ne faisait clairement pas l’unanimité au sein des hommes du clan. Tu ne t’es pas toujours intéressé aux raisons de cette aversion, pour toi, il était de la famille et c’était suffisant. Vous étiez proches. Mais l’endoctrinement avait rendu cette relation plus compliquée. Car plus tu grandis, plus tu te rends compte de ce qui ne colle pas entre l’organisation et ton cousin. Ça et ton père qui se murmure à l’oreille comme un charmeur de serpent. Car, après tout, pourquoi un bâtard aurait-il plus de droit que son fils à lui pour prendre la succession de Hera un jour ? T’as développé cette espèce de schizophrénie entre ton ambition perso et ton affection. C’était désormais toi qui veillais sur Conway, rattrapait au mieux ses conneries, les passant sous silence si possible. Tu l’aimais autant qu’il t’exaspérait.

Tu t’es vautré dans la vie comme un petit prince de l’enfer. Tu n’as ni âme ni dieu, le seul maître que tu reconnais est une maîtresse : Hera et personne d’autre. Des dissensions au sein du clan, tu ne veux pas entendre parler. Toi t’es là pour que les choses roulent. Il a vite été clair pour tout le monde que ton esprit pragmatique et ton intelligence plus acéré que ton cran d’arrêt étaient des atouts maîtres, des atouts qui pouvaient servir merveilleusement au sein de l’organisation. Alors t’es devenu le hell hound, le chien des enfers. Celui qui garde le troupeau de p’tits cons dans le droit chemin. Putes, proxo… Ils ont intérêt à filer doux parce qu’avec toi y’a pas de pardon qui tienne. Tu déconnes, tu crèves. Tu touches à la marchandise, t’as plus de main. Dans le meilleur des cas. T’es pas là que pour sévir. T’es là aussi pour t’assurer que tout se passe au mieux, que les proxo sont satisfaits du matos, de satisfaire leurs quelques demandes, dans la limite du raisonnable. T’es aussi le premier rempart entre l’organisation et le monde extérieur, le premier pare-feu à franchir pour espérer – c’est bien le mot – avoir une espèce d’accès à Hera, de quelque manière que ce soit. Mais t’es pas assez con pour faire que ça de ton temps. Et t’es surtout bien trop indépendant pour pas avoir ton propre business. Alors, avec l’aide du clan, t’as monté ta beauté de sécurité. L’éventail des choix est large : gardes du corps, chauffeurs spécialisés, système de vidéo-surveillance… t’offres tout une gamme de service. Tu paies grassement pour t’assurer de la loyauté des employés et surtout qu’ils ferment leur gueule. Ton principal client, c’est l’Hera, bien évidemment mais t’as étendu ton champ professionnel de manière assez impressionnante dans ton coin et t’es pas peu fier de voir que tu récoltes le fruit de ton labeur. Alors ouais, après tout ça, tu baises. Pas des putes, hein. Manquerait plus que tu tombes aussi bas. Mais vu la vitesse à laquelle elles font tomber leurs culottes – quand elles en portent – et tout ce que t’allonges de tunes pour qu’elle s’en mette plein le nez ou le gosier, on pourrait estimer que le terme de « pute » est passablement mérité. Franchement, tu t’en branles tant que tu prends ton pied.